Quelles sont mes responsabilités en tant qu’employeuse ou employeur
Pour bien des gens, la création d’une entreprise ne repose pas sur un désir de devenir employeuse ou employeur. Pour les entrepreneures et entrepreneurs en herbe, c’est leur produit qui les enthousiasme et ils sont impatients de le voir connaître de l’essor. Toutefois, même les petites entreprises ont besoin de personnel pour se développer.
Selon Statistique Canada, les entreprises qui emploient 99 personnes ou moins représentaient 98 % de toutes les entreprises qui emploient du personnel au Canada en 2022. Cela fait beaucoup d’entreprises qui embauchent et gèrent des personnes.
Esi Codjoe, avocate spécialisée en droit du travail, explique que de nombreuses entreprises doivent approfondir leur compréhension de leurs obligations envers leur personnel. Associée dans le cabinet Turnpenney Milne LLP et spécialiste du droit du travail et de l’emploi ainsi que des droits de la personne, elle effectue des enquêtes, des examens et des évaluations en milieu de travail et assure la médiation de conflits. Selon elle, ce type de travail coûteux pourrait être évité si les entrepreneures et entrepreneurs étaient plus conscients de ce que l’on attend d’eux sur le plan juridique.
Quelles lois les employeuses et les employeurs doivent-ils connaître?
Selon Esi Codjoe, toutes les employeuses et tous les employeurs canadiens devraient connaître trois types de lois.
1. Législation sur les normes minimales
Chaque province ou territoire a son propre ensemble de normes d’emploi qui décrivent les obligations des employeuses et employeurs envers leur personnel.
Normes du travail par province et territoire du Canada:
- Normes d’emploi de l'Alberta
- British Columbia Employment Standards Act
- Normes d’emploi du Manitoba
- Loi sur les normes d’emploi du Nouveau-Brunswick
- Labour Standards Act de Terre-Neuve-et-Labrador
- Normes d’emploi des Territoires du Nord-Ouest
- Nova Scotia Employment Rights
- Loi sur les normes du travail du Nunavut
- Loi sur les normes d’emploi de l’Ontario
- Normes d’emploi de l’Île-du-Prince-Édouard
- Normes du travail au Québec
- Normes d’emploi de la Saskatchewan
- Normes d’emploi du Yukon
Certains secteurs sont sous réglementation fédérale, ce qui signifie qu’ils sont assujettis au Code canadien du travail. Esi Codjoe mentionne qu’il est important de savoir quelle est la législation à laquelle les entreprises de votre secteur d’activité doivent se conformer.
«Si votre entreprise est une PME, elle est probablement sous réglementation provinciale. Entre autres secteurs sous réglementation fédérale, on compte les télécommunications, le transport, l’exploitation minière et l’énergie nucléaire.»
Que votre entreprise soit sous réglementation provinciale ou fédérale, vous devez vous acquitter, en tant qu’employeuse ou employeur, de certaines responsabilités afin de satisfaire aux besoins fondamentaux, qui sont définis par la loi. Les dispositions varient d’un territoire à l’autre, mais comprennent le salaire minimum, les heures de travail et certains droits comme le droit à des périodes de repos, à des vacances et à des congés.
Esi Codjoe explique: «La législation indique: "Ceci représente le minimum. Vous pouvez accorder plus, mais pas moins".»
2. Obligations en matière de droits de la personne
Les employeuses et employeurs doivent savoir ce que l’on attend d’eux en matière de droits de la personne, par exemple traiter toutes les personnes de la même manière et ne pas faire de discrimination fondée sur des caractéristiques telles que la race, la citoyenneté, l’âge ou l’identité de genre.
«La plupart des gouvernements provinciaux ont une commission, un tribunal ou un conseil des droits de la personne, dont le mandat consiste notamment à diffuser des bulletins d’information ou à informer le public sur le fonctionnement du système de droits de la personne. Ils publient généralement des articles de vulgarisation qui expliquent, par exemple, ce qu’est la discrimination fondée sur le handicap ou le sexe», déclare Esi Codjoe.
Elle ajoute: «Il est très utile de se familiariser avec les lois. Ces ressources fournissent les informations dont vous avez besoin.»
3. Législation en matière de santé et de sécurité au travail
La santé et la sécurité sont fondamentales en milieu de travail. «Ne pas comprendre cela pourrait mettre des vies en danger, dit la spécialiste, ajoutant qu’une jeune employée ou un jeune employé peut perdre la vie à cause d’un mode d’emploi incorrect d’une machine en particulier. Ce genre d’incident arrive plus souvent qu’on ne le pense.»
À l’instar de la législation sur les normes minimales, les milieux de travail sous réglementation provinciale doivent se conformer aux lois provinciales, tandis que les employeuses et employeurs sous réglementation fédérale sont soumis aux lois fédérales. La plupart des provinces ont une commission ou un tribunal auprès desquels les employées et employés peuvent porter plainte pour violation des règles en matière de santé et de sécurité, et où les employeuses et employeurs peuvent trouver des renseignements.
«La plupart des sites web provinciaux expliquent aux employeuses et employeurs quelles sont leurs obligations», explique Esi Codjoe.
Procédures standard pour les employeuses et employeurs
Esi Codjoe conseille à toutes les employeuses et à tous les employeurs de mettre en place sur leur lieu de travail des procédures qui respectent les lois du travail et de l’emploi en vigueur dans leur province ou territoire.
Contrats écrits
Il est essentiel d’établir pour chaque membre du personnel un contrat écrit qui comprend des renseignements de base comme le taux de rémunération, les heures de travail, les attentes des deux parties et les règles en vigueur sur le lieu de travail.
«Techniquement, une poignée de main peut remplacer un contrat, mais ce n’est pas une pratique exemplaire. Vous devez disposer d’un contrat écrit que la personne peut examiner et présenter à une avocate ou un avocat si elle le souhaite. Ce contrat permet de décrire précisément les attentes», explique Esi Codjoe.
Politiques en vigueur sur le lieu de travail
Les politiques sont également essentielles en milieu de travail. «Le nombre d’organisations qui n’ont pas de politiques ou dont les politiques ne sont pas solides est surprenant. Selon la province ou le territoire où vous exercez vos activités, de telles politiques peuvent être exigées par la loi,» dit la spécialiste.
Ces documents doivent contenir tout ce que l’employeuse ou l’employeur souhaite bien faire comprendre, ainsi que toute exigence réglementaire de la province. Par exemple, en Ontario, les employeuses et employeurs qui ont un effectif de 25 personnes ou plus sont tenus d’avoir une politique écrite sur la déconnexion du travail. Ils doivent également fournir une copie de la politique écrite à tous les membres de leur personnel.
«Chaque province ou territoire peut avoir des exigences très précises en matière de politiques, généralement dans les domaines des droits de la personne ainsi que de la santé et la sécurité. Il est important de consulter le site Web de votre province ou territoire pour connaître vos obligations. Si vous venez de créer une entreprise, adressez-vous à une avocate ou un avocat qui se spécialise dans les questions d’emploi pour obtenir des conseils», suggère Esi Codjoe.
Autres renseignements à prévoir dans une politique:
- les détails sur la paie, tels que la fréquence de la paie, la méthode utilisée et le mode de diffusion des bordereaux de paie;
- la technologie utilisée sur le lieu de travail;
- les personnes à qui s’adresser au sein de l’organisation pour formuler une plainte.
«C’est le genre d’informations qui profitent non seulement au personnel, mais aussi aux employeuses et employeurs, dit Esi Codjoe. En cas de litige, vous pouvez les consulter. De plus, un membre du personnel qui a besoin d’éclaircissements pourra y trouver des précisions. Tout le monde y gagne.»
Obligations salariales des employeuses et employeurs
Les obligations en matière de paie sont définies dans la législation sur les normes minimales dans votre province ou territoire, qui indiquent les exigences relatives à l’exploitation d’une entreprise.
Toutes les entreprises sont tenues de respecter les obligations fédérales, notamment de verser les impôts et d’effectuer les retenues à la source (par exemple, pour l’assurance-emploi, le Régime de pensions du Canada) et toute autre retenue contractuelle à laquelle l’employeuse ou l’employeur a consenti (le régime de retraite collectif, le REER, etc.). Toutes ces retenues doivent être effectuées avec précision et les sommes doivent être remises au bon organisme.
Les employeuses et employeurs ont-ils l’obligation de donner des références?
Il y a certaines idées fausses au sujet des références. Les références se résument à trois documents distincts.
Lettre de recommandation
Une lettre de recommandation est un document matériel qu’une employeuse ou un employeur remet à un ancien membre de son personnel. Dans ce document, l’employeuse ou l’employeur parle en termes élogieux du travail de l’ancienne employée ou l’ancien employé et offre d’en discuter avec une ou un responsable du recrutement d’une autre organisation.
Les employeuses et employeurs ne sont pas tenus de fournir une lettre de recommandation. Toutefois, Esi Codjoe estime qu’il est judicieux de fournir des références verbales, car cela aide les anciens membres du personnel dans leur recherche d’emploi. L’essentiel est de fournir une évaluation honnête des compétences et des capacités de la personne. «Si une personne affirme qu’elle a subi un congédiement injustifié et qu’elle est à la recherche d’un emploi, le manque de références a une incidence sur sa capacité à trouver un nouvel emploi. Si elle a intenté une poursuite pour congédiement injustifié, le fait que vous n’ayez pas accepté de fournir des références pourrait être retenu contre vous.»
Lettre d’emploi
Selon Esi Codjoe, une lettre d’emploi est plus succincte. «Elle indiquera la date à laquelle l’ancienne employé ou l’ancien employé a commencé à travailler dans l’organisation et dans quelles fonctions, les postes qu’elle ou il a occupés à mesure de l’évolution de sa carrière dans l’entreprise, et le poste qu’elle ou il occupait au moment de son départ. Elle peut comprendre quelques lignes sur ce que la personne a accompli et se terminer par un remerciement pour le temps passé dans l’entreprise. Cette lettre porte sur la personne elle-même et sur ce qu’elle a fait.» La lettre d’emploi est souvent celle que les employeuses et employeurs préfèrent.
«De plus, une lettre d’emploi est requise pour toute une série d’autres raisons que le départ d’une entreprise. Un membre du personnel en poste peut en avoir besoin pour louer un logement ou acheter une maison, ou demander un prêt hypothécaire ou une autre forme de crédit. La personne doit pouvoir prouver où elle travaille et ce qu’elle gagne.»
Relevé d’emploi
Les employeuses et employeurs sont tenus par la législation fédérale de fournir un relevé d’emploi (RE). Celui-ci est encore plus succinct qu’une lettre d’emploi. Ce relevé
confirme l’emploi de la personne dans votre organisation et son taux de rémunération. Des sanctions sont appliquées s’il n’est pas fourni.
Les employeuses et employeurs ont-ils l’obligation de payer les heures supplémentaires?
Cela dépend de la législation sur les normes minimales à laquelle votre entreprise est assujettie.
«Si les normes minimales de votre province stipulent que vous devez payer les heures supplémentaires, vous avez l’obligation de le faire», explique Esi Codjoe.
Toutefois, certaines catégories de personnel (comme les cadres) n’ont pas droit à la rémunération des heures supplémentaires. Les entrepreneuses et entrepreneurs indépendants n’y ont pas droit non plus.
«Certaines personnes qui effectuent un travail ne sont pas considérées comme étant des membres du personnel aux fins de la législation sur les normes minimales. Si elles ne sont pas couvertes par la législation, elles n’ont pas droit au paiement des heures supplémentaires. Toutefois, une entrepreneure indépendante ou un entrepreneur indépendant pourrait s’assurer que le droit au paiement des heures supplémentaires est prévu dans son contrat de travail/contrat de services.»
Comment les employeuses et employeurs peuvent-ils protéger la dignité et la vie privée de leur personnel?
Selon Esi Codjoe, les employeuses et employeurs doivent respecter la dignité et la vie privée des membres de leur personnel. Ceci est particulièrement pertinent lorsqu’il s’agit de licencier une personne.
Il est inacceptable d’humilier publiquement la personne, d’élever la voix, de la renvoyer devant ses collègues et de faire appel à la sécurité (à moins qu’il n’y ait des problèmes de sécurité), déclare Esi Codjoe.
«Faites-le dans un environnement où les gens ne voient pas la personne être accompagnée vers la sortie. Évitez également de procéder à un licenciement lorsque la personne s’apprête à vivre un événement spécial, comme le mariage de son enfant, par exemple.»
La protection de la vie privée est devenue primordiale à l’ère des réseaux partagés et de l’utilisation d’appareils appartenant à l’entreprise, explique Esi Codjoe.
Ce n’est pas parce que vous pouvez surveiller ce que les membres du personnel font ou ont fait que vous devez le faire. Si vous découvrez par hasard quelque chose qu’un membre du personnel a fait sur l’ordinateur de son lieu de travail, cela ne veut pas dire que vous devez fouiller. Par exemple, si un membre du personnel laisse son courrier électronique personnel ou ses services bancaires en ligne ouverts sur son ordinateur, cette personne doit raisonnablement s’attendre à ce que sa vie privée soit respectée.
«Même si, en tant qu’employeuse ou employeur, vous consultez par erreur des informations privées, vous risquez, en fin de compte, de faire l’objet d’un litige. Une ou un juge ou un membre du tribunal pourrait dire que l’employée ou l’employé a pris des mesures pour s’assurer que personne ne consulterait ses informations privées, et qu’une fois que vous avez constaté de quel type d’information il s’agissait, vous auriez dû cesser de les consulter.»
Qui paie les indemnités des membres du personnel?
L’indemnisation des membres du personnel est financée par l’employeuse ou l’employeur et gérée conformément à la législation provinciale.
Quelles sont les obligations de l’employeuse ou de l’employeur les plus susceptibles d’être enfreintes?
Selon Esi Codjoe, les principales infractions commises par les employeuses ou employeurs sont liées aux normes minimales. En voici quelques exemples:
- défaut de paiement du salaire ou de l’indemnité de départ;
- manquement à l’obligation de protéger raisonnablement la sécurité d’un membre du personnel;
- traitement injuste aux termes de la législation sur les droits de la personne (généralement lié à un handicap).
Obligations des membres du personnel envers leur employeuse ou employeur
Les obligations en milieu de travail touchent tant l’employeuse ou l’employeur que la personne qui est employée.
Selon Esi Codjoe, à l’instar des obligations des employeuses et employeurs en matière de protection de la vie privée, les membres du personnel ont l’obligation de protéger la confidentialité de leur employeuse ou employeur. Cela signifie que le personnel ne doit rien divulguer touchant les secrets commerciaux, les renseignements opérationnels et la propriété intellectuelle. «Cela couvre tout ce qui pourrait être préjudiciable à l’employeuse ou l’employeur. Cette disposition est généralement énoncée dans les contrats de travail.»
Autres obligations:
- ne pas dérober une cliente ou un client de l’employeuse ou l’employeur;
- exécuter le travail pour lequel on est payé, au niveau attendu;
- respecter toutes les autres conditions contractuelles dont il a été convenu;
- se conformer aux lois en vigueur dans le secteur d’activité, la province ou le territoire et le pays;
- respecter les politiques en vigueur sur le lieu de travail.
«Ces nuances concernant les attentes doivent être décrites dans les politiques relatives au lieu de travail», précise la spécialiste.
Un membre du personnel qui ne respecte pas ces règles pourrait voir sa relation de travail résiliée.
Quel est le salaire minimum au Canada?
Le salaire minimum a été augmenté à 16,65 $/heure en avril 2023 pour les employées et employés du secteur privé sous réglementation fédérale. Lorsqu’un taux de salaire minimum provincial ou territorial est plus élevé que le salaire minimum fédéral, les employeuses et employeurs doivent appliquer le taux le plus élevé.
Comment les employeuses et employeurs peuvent-ils s’assurer qu’ils respectent leurs obligations?
Esi Codjoe explique que vous pouvez vous assurer de remplir toutes vos obligations en consultant une avocate ou un avocat qui connaît la province ou le territoire dans lequel vous exercez vos activités.
«Même si votre entreprise est déjà établie, cela vaut toujours la peine de prendre le temps de consulter pour savoir ce que vous devez faire. La plupart des spécialistes du droit du travail rencontrent les employeuses et employeurs lorsque ceux-ci ont des difficultés avec une employée ou un employé. Nous leur disons: "J’aurais aimé que vous veniez me voir plus tôt, nous aurions pu vous éviter cela".»
«Ce que vous avez pu économiser en ne cherchant pas conseil plus tôt, vous le dépenserez en fin de compte pour réparer les dégâts.»
Prochaine étape
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