Achat d’une entreprise: principaux pièges à éviter lors de la négociation d’un contrat d’achat
La négociation d’un contrat d’achat est l’une des dernières étapes du processus d’acquisition d’une entreprise. Elle arrive généralement après que vous avez signé une lettre d’intention et que vous avez effectué la plus grande partie de votre diligence raisonnable.
C’est le moment où vous prenez la décision définitive de conclure ou non la transaction, ainsi qu’à quel prix et selon quelles modalités. Cela peut donner lieu à des négociations compliquées aux enjeux élevés.
Spécialiste du secteur juridique, Angelo Noce a négocié de nombreux contrats d’achat depuis ses débuts il y a 20 ans chez Blakes, un cabinet d’avocats et avocates canadien de premier plan. Angelo explique les différentes sections d’un contrat type et signale les pièges courants à éviter lors de la négociation de ces contrats, qui peuvent compter de 40 à 100 pages.
La structure du prix d’achat
Les négociations préliminaires vous auront permis d’en arriver à une entente de principe sur le prix de l’entreprise. Ce prix sera reflété dans la lettre d’intention pour l’acquisition de l’entreprise.
Toutefois, il se peut que vous deviez négocier une structure de prix différente en fonction de votre diligence raisonnable à l’égard de l’entreprise. C’est pour cette raison que votre diligence raisonnable devrait englober tous les aspects de l’entreprise, y compris les aspects juridiques, fiscaux, financiers, opérationnels, environnementaux et technologiques, ainsi que ceux concernant la propriété intellectuelle.
«On ne doit pas tourner les coins ronds quand il s’agit de diligence raisonnable», affirme Angelo Noce, une personne associée de Blakes qui pratique au sein du groupe du droit des fusions et acquisitions du cabinet à Montréal. «Quand vous avez exercé une diligence raisonnable appropriée, vous disposez des outils nécessaires pour prendre des décisions lors de la négociation du contrat d’achat.»
Au cours de ces négociations, vous déciderez généralement du montant du prix d’achat qui sera payé immédiatement après la clôture de la vente et du montant qui sera mis en main tierce ou assujetti à des conditions.
Des rajustements du prix d’achat auront habituellement lieu en fonction de l’état de l’entreprise le jour où vous la prenez en charge. Le montant du fonds de roulement de l’entreprise à la clôture constitue un rajustement particulièrement important. Un montant cible raisonnable doit être déterminé lors de la diligence financière afin que l’acheteur ou l’acheteuse puisse être en mesure d’exploiter l’entreprise le premier jour et que cette personne n’ait pas à injecter immédiatement des fonds supplémentaires dans l’entreprise.
Déclarations et garanties
Il s’agit du cœur du contrat d’achat, la répartition des risques. La vendeuse ou le vendeur y décrit officiellement l’état de l’entreprise et divulgue tout problème dont il a connaissance.
«C’est la vendeuse ou le vendeur qui vous dit qu’il n’y a pas de litiges, pas de problèmes environnementaux, pas de problèmes de travail. Il est difficile pour n’importe quelle entreprise, dans n’importe quel secteur, de faire des déclarations claires de ce genre de choses. Donc, en règle générale, on dira qu’il n’y a pas d’autre litige que celui indiqué dans telle ou telle annexe.»
À ce stade, vous négocierez également qui assumera les divers risques liés aux questions divulguées. Par exemple, les parties s’entendront sur la responsabilité de payer des dommages-intérêts si une poursuite est intentée contre l’entreprise ou si un problème environnemental se manifeste après la clôture.
Clauses restrictives
Ce sont les mesures que les deux parties conviennent de prendre, avant et après la clôture.
Par exemple, le vendeur ou la vendeuse acceptera d’exploiter l’entreprise comme d’habitude jusqu’à la clôture de la vente, évitant ainsi toute décision radicale comme de nouvelles dépenses en immobilisations ou des changements de personnel importants.
Une autre clause restrictive pourrait être un accord de non-concurrence, en vertu duquel la vendeuse ou le vendeur promet de ne pas participer à une entreprise concurrente pendant un certain nombre d’années après la clôture.
Conditions de clôture
Dans la plupart des acquisitions, il s’écoule un certain temps entre la signature du contrat d’achat et la clôture de la transaction, soit la date à laquelle vous prenez réellement possession de l’entreprise.
Les conditions de clôture sont des engagements que le vendeur ou la vendeuse promet de respecter pendant cette période afin de conclure la transaction.
Par exemple, il peut y avoir des baux ou des contrats pour lesquels la vendeuse ou le vendeur doit obtenir le consentement d’une tierce partie pour les transférer à un nouveau ou une nouvelle propriétaire. Il peut également y avoir des approbations réglementaires, comme des approbations en vertu de la Loi sur la concurrence, à obtenir, ou encore des mesures correctives à prendre, comme le traitement des questions relatives à l’entreprise ou à l’environnement qui ont été repérées pendant la diligence raisonnable.
Indemnités
Il s’agit d’une section importante et «fortement négociée» où les parties s’entendent sur les règles de base régissant la compensation que le vendeur ou la vendeuse devra payer si les divulgations concernant l’entreprise s’avèrent inexactes ou si les clauses restrictives ne sont pas respectées.
Par exemple, si la vendeuse ou le vendeur divulgue qu’il y a deux poursuites en cours et qu’il y en a en fait cinq, quelle compensation ou quelle indemnité doit être versée à l’acheteur ou l’acheteuse de sa part?
Il est important de noter que le vendeur ou la vendeuse d’une entreprise n’est pas responsable des fausses déclarations pour toujours et que sa responsabilité est généralement limitée à un certain pourcentage du prix d’achat. Les normes du marché en matière d’indemnité ont beaucoup changé au Canada au cours des dernières années, de sorte qu’il est encore plus important que des conseillers et conseillères qui connaissent bien ces normes guident toutes les parties.
Angelo Noce indique que le marché de l’acquisition favorise actuellement les personnes qui vendent. Elles peuvent donc faire une bonne affaire non seulement sur le prix d’achat, mais aussi sur le plafonnement de leur responsabilité et la limitation de la période pendant laquelle elles doivent indemniser la personne qui prendra les rênes de l’entreprise.
«Nous avions l’habitude de voir des plafonds de responsabilité au Canada qui représentaient de 50 % à 100 % du prix d’achat. Généralement, le plafond est maintenant de 10 % ou 15 % du prix d’achat», Angelo Noce. «Et ce type de réclamations a habituellement une période de survie de 12 à 18 mois.»
Accords auxiliaires
Des accords auxiliaires accompagnent souvent le contrat d’achat principal. Il peut s’agir, par exemple, de clauses de non-concurrence ou d’emploi pour le personnel clé, ou d’une entente de services de transition, en vertu de laquelle le vendeur ou la vendeuse accepte de fournir des services après la clôture.
Derniers conseils
Angelo Noce conseille aux propriétaires d’entreprise de ne pas sous-estimer à quel point il peut être fastidieux et perturbateur de faire une acquisition, en général, et de négocier un contrat d’achat, plus particulièrement. Selon Angelo, libérer une ou plusieurs personnes de la direction pour qu’elles se concentrent sur l’acquisition est souvent une bonne idée.
«Il est important pour une ou un propriétaire d’entreprise de prendre conscience qu’il ne s’agit pas que d’un simple exercice de quelques heures par semaine. La période critique du contrat d’achat peut presque en faire un emploi à temps plein. Vous devez donc consacrer beaucoup de temps et de ressources au processus d’acquisition, tout en continuant à exploiter votre entreprise.»