Comment ce fabricant de vélo a relevé ses défis de productivité
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Francis Morin, directeur général, Cycles Devinci
Francis Morin, directeur général de Cycles Devinci, était devant une impasse. Alors que la pandémie faisait exploser la demande pour les vélos de l’entreprise de Chicoutimi, les pièces nécessaires pour les fabriquer et les assembler étaient immobilisées de l’autre côté du Pacifique. «Des dizaines de milliers de conteneurs étaient coincés dans différents ports. C’était donc difficile d’en trouver pour acheminer ce qu’on achetait en Asie», dit-il.
Non seulement le transport de marchandises était-il difficile à organiser, mais la capacité de production des entreprises fournisseuses de pièces en Asie était limitée en raison notamment des mesures visant à enrayer la COVID. «Les délais d’approvisionnement, historiquement d’environ 120 jours, sont passés à plus de 700 jours dans certains cas. Nos équipes ont dû prévoir et commander nos gammes de produits jusqu’à deux ans d’avance pour réserver du temps de production chez nos fournisseurs.»
L’entreprise a aussi dû composer avec une importante carence de main-d’œuvre, jumelée à un besoin grandissant de ressources, ce qui a limité sa capacité de production.
Or, Cycles Devinci a quand même réussi à relever ces défis en maintenant un bon rythme de croissance, notamment en misant sur l’amélioration de ses processus et de sa productivité avec l’aide de BDC Services-conseils.
Jongler avec la chaîne d’approvisionnement
Il faut dire que Cycles Devinci avait un avantage important par rapport aux entreprises concurrentes en ce qui a trait au transport.
En effet, Francis Morin avait entrepris tout juste avant la pandémie un important projet visant le rapatriement au Québec d’une part importante de sa production. L’entreprise est ainsi devenue le plus grand fabricant de vélos au Canada.
«On a vu toute la valeur de faire l’assemblage et la fabrication ici, dit-il. Sur le plan du transport, par exemple, on fait venir nos composantes en pièces détachées, plutôt que de faire venir des vélos tout assemblés, ce qui fait que l’on a des gains de 50 % sur la capacité de transport requise.»
Il restait encore à trouver un moyen d’obtenir toutes les pièces nécessaires à la fabrication d’un vélo.
L’entreprise a d’abord trouvé des entreprises qui pouvaient entreposer les composantes qu’il achetait en Asie, en attendant de déterminer comment les acheminer au Québec pour l’assemblage des vélos.
Comme les entreprises fournisseuses ne voulaient pas garder les pièces dans leurs usines, elles vendaient leurs produits en priorité aux clientes et clients qui pouvaient faire bouger les stocks. «On a donc dû dénicher des options locales d’entreposage pour assurer notre approvisionnement.»
Cycles Devinci a aussi délaissé en partie les marchés internationaux pour recentrer ses ventes sur le marché nord-américain, ce qui a permis de simplifier la gestion du transport. Et l’entreprise a misé sur la diversification des fournisseuses et fournisseurs pour assurer un flux constant de composantes.
«Si tu as besoin de 100 pièces pour faire un vélo, mais que tu en as seulement 95, ta production reste paralysée», indique Francis Morin.
«Pour les dérailleurs, par exemple, il n’y a parfois pas vraiment d’option de rechange. Certains cyclistes veulent du Shimano, point. Mais pour les guidons, par exemple, on a pu trouver des équivalents chez d’autres entreprises de fabrication.»
Finalement, Cycles Devinci a commandé des composantes d’avance, du moins, plus qu’à l’habitude, pour assurer son approvisionnement, explique le directeur général.
La main d’œuvre, un deuxième défi
La décision de Cycles Devinci de fabriquer ses cadres et d’assembler ses vélos en Amérique du Nord a également aidé l’entreprise à relever les défis liés à la pénurie de main-d’œuvre.
Les opérations de l’entreprise sont séparées en deux grandes étapes: la fabrication de cadres et l’assemblage de vélos. Comme la fabrication était moins touchée par les problèmes d’approvisionnement en Asie, Cycles Devinci a pu réaffecter une partie de son personnel de la fabrication vers l’assemblage.
«Les membres de notre personnel ayant plus d’expérience nous ont permis de travailler autour de la polyvalence des postes et d’améliorer notre processus de formation, mentionne-t-il. C’est un atout d’avoir une équipe de production qui peut faire des petits miracles. Nous avons produit 40 % de notre chiffre d’affaires en trois mois pour rattraper le retard du début d’année.»
L’entreprise a aussi redoublé d’ardeur pour accélérer son recrutement. Puis, Cycles Devinci a entamé des démarches pour recruter de la main-d’œuvre internationale pour certains postes essentiels, comme ceux de soudeuses et soudeurs et de machinistes. Enfin, l’entreprise a réaménagé son usine pour améliorer son flux de matériel, et donc son efficacité.
«Grâce à tout ça, nous allons doubler notre capacité d’assemblage pour soutenir la croissance de Devinci et de nos deux clients majeurs», dit Francis Morin.
Des plans pour l’automatisation
Les entreprises nord-américaines qui désirent demeurer concurrentielles n’ont pas le choix de développer l’automatisation dans leurs usines, reconnaît le directeur général. Et Cycles Devinci ne fait pas exception.
Pour cette raison, le fabricant a enclenché une seconde phase d’automatisation de sa production.
Le plan d’aménagement de son usine a été revu aux fins d’amélioration du flux de matériel et du flux d’informations. L’entreprise désire avoir une usine à la fois performante et sécuritaire pour son personnel.
«Nous avons différents projets que l’on veut développer à court terme. Notre plan d’investissement est déjà en marche, dans l’optique de doubler la capacité de production d’ici 12 à 18 mois. Nous avons par ailleurs acheté des équipements qui seront essentiels pour la mise en œuvre de notre stratégie d’usine Devinci 4.0», explique-t-il.
Cette stratégie permettra au fabricant de déjouer la pénurie de main-d’œuvre, de réduire ses coûts, d’augmenter son efficacité et d’assurer une qualité encore pour meilleure sa clientèle.
Dans le cadre de cette vision d’automatisation, Cycles Devinci a notamment procédé à l’installation d’un nouveau système ERP. Afin de soutenir les opérations, l’entreprise a aussi mis en place un nouveau centre logistique pour fournir ses chaînes de montage additionnelles.
«Ça va nous permettre de passer à la vitesse supérieure parce qu’un ERP, c’est la colonne vertébrale des opérations», note Francis Morin. Le nouveau système sera entre autres plus intuitif et facile d’utilisation, avec une meilleure interface.
Grâce aux efforts qui ont été déployés pour augmenter son efficacité et pour solutionner ses enjeux d’approvisionnement et de main d’œuvre, Cycles Devinci est fin prête pour l’avenir - un avenir qui s’annonce reluisant: l’entreprise compte doubler ses ventes d’ici cinq ans.